DES THÉOLOGIENS BIEN
ÉVEILLES
C'est une terrible expérience que
de constater que non seulement les théologiens
et rabbins juifs mais aussi d'innombrables
théologiens et prédicateurs
chrétiens ne tiennent pas pour vraie
"l'eschatologie" prophétique et
apocalyptique des prophètes du Premier
Testament, des apôtres et
évangélistes du Nouveau Testament, et (
le plus grave !) du Seigneur Jésus
lui-même.
C'est également une affreuse
expérience que de constater les
résultats de cette catéchèse dans
les têtes, les coeurs, les vies, les
piétés, les espérances des
fidèles.
Mais chut ! L'Église dort si bien
! Surtout ne réveillez pas le
bébé!
Et ne vous réveillez pas
vous-mêmes, conducteurs aveugles qui savez si
bien, dans vos théologies, remplacer la
proximité et l'imminence du Règne et de
la Parousie par les mythes du Progrès, la foi
en l'église ou les utopies humanistes au
gré des idéologies du jour ou des
conservatismes !
Je ne veux pas m'attarder sur ce
gémissement douloureux (car l'Avènement
arrive de toute façon, et sans tarder !). Je
voudrais pourtant faire remarquer comment
procède le théologien (ou le philosophe
"religieux") pour donner à croire à ses
frères le contraire des vérités
ou des promesses qu'il voit bien, pourtant, clairement
inscrites dans les Écritures.
L'exemple qui me frappe le plus est
celui d'André Chouraqui, cet Écrivain
juif célèbre qui a fait une oeuvre
immense et admirable de traduction et d'explication de
la Bible. C'est un régal pour moi d'utiliser
sans cesse sa traduction (sauf qu'elle est illisible
en chaire !) et de voir la pertinence de ses notes et
de ses commentaires, sur l'Évangile notamment.
Mais alors ! Alors je ne cesse pas de me demander :
comment cet homme fait-il pour ne pas croire en
Jésus son Messie?
Peut-être suis-je dans l'erreur en
disant qu'André Chouraqui ne croit pas
que Jésus est le Messie d'Israël ? Je ne
suis pas dans le secret de sa relation personnelle
avec le Seigneur IHVH, Adonaï. Mais je constate
que lorsqu'il exprime clairement son espérance
et ce qu'il attend de l'avenir pour Israël et
pour les nations, il exprime nettement sa foi en
l'homme, sa foi en la bonne volonté de
l'humanité, sa foi en une paix universelle
fruit d'une "alliance des peuples " (
monothéistes !) faisant naître un "homme
nouveau" ...Ce qui est l'inverse de l'eschatologie
biblique attendant tout de Dieu :
" S'il est un recours contre
l'universelle horreur des massacres qui se commettent
ou qui se préparent, il ne se trouve que dans
la toute-puissance de l'Amour. Cette Oeuvre (= la
traduction de l'Évangile, le "Pacte neuf")
l'affirme à nouveau: il ne sera de salut
qu'à partir de notre renoncement à tout
meurtre, à toute guerre, dans l'universelle
réconciliation de l'homme avec l'homme, son
frère. Il dépend de nous, de
notre réveil et de notre relèvement,
qu'au bout de la nuit s'incarne enfin l'utopie
prophétique, avec la naissance d'un homme
nouveau. Une terre nouvelle l'attend
déjà... Hommes, mes frères, il
est temps de répondre à l'appel de
l'Amour. !!" (Bible Chouraqui, Desclée 1989
: " Liminaire pour un pacte neuf " pp. 1872 et
1873)
Le lyrisme de tels espoirs cache mal le
désespérant idéalisme du penseur
occidentalisé et de son rationalisme (qui
ressemble plus à celui d'un Roger Garaudy,
philosophe "chrétien" violemment anti-sioniste,
qu'au message des prophètes d'Israël
!).
Quel "mystère", d'ailleurs,
qu'une "espérance" analogue chez un Albert
Schweitzer, ce surdoué de la théologie
qui, au début du 20 éme siècle,
tout à la fois faisait redécouvrir le
caractère "eschatologique" de tout le message
de Jésus (selon tout le Nouveau Testament) et
... confessait ne point y croire lui-même!
Quel mystère que ce scepticisme
de nos plus clairvoyants exégètes !
Heureusement que beaucoup d'autres, en
cette génération, nous ont bien
réveillés, étant eux-mêmes
délivrés de la grande léthargie
sur l'Arrivée de Jésus "dans la gloire
du Père" !
Leurs traductions de notre passage de la
lettre aux Romains a été pour moi un
guide sûr :
"Que sera leur
réintégration sinon la
résurrection des morts ?"
(Père Lagrange p. 277)
"Que sera leur
retour en grâce sinon la vie rendue aux
morts?" (Goguel & Monnier avec
explications par I Corinthiens 15. 22-26)
" A quoi
correspondra leur intégration sinon
à la Vie surgissant d'entre les
morts ? " (A.
Maillot)
"Qu'arrivera-t-il
alors, quand ils seront accueillis ? Ce sera
la vie pour ceux qui étaient
morts" (Traduction
français courant)
"Alors, quand il les
accueillera de nouveau, que va-t-il se passer
? Ceux qui étaient morts
reviendront à la vie ".
(traduction français fondamental)
"Que ne fera leur
réintégration, sinon la vie
d'entre les morts" (Père
Refoulé, qui précise en
écrivant: "la vie d'entre les morts
"devrait être pratiquement comprise
comme synonyme de résurrection d'entre
les morts" au sens propre,
et corporel, de cette
résurrection finale" p.
253)
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QUELQUES CITATIONS
Pour proposer à un
éventuel mais improbable lecteur de suivre un
peu le cheminement que j'ai suivi moi-même,
voici quelques citations qui, au-delà de la
traduction, débouchent sur la bonne
compréhension du "mystère"
révélé à l'apôtre
Paul. Ces citations, d'ailleurs, nous conduiront aussi
à une autre question, celle du "comment ":
comment se fera ce salut final pour " tout Israël
" ?
Voici tout d'abord Karl Barth : "
Petit commentaire de l'Épître aux
Romains" Labor & Fides 1956 : pages 132 &
suivantes
" L'Église de Jésus-Christ
a besoin des juifs. Elle a besoin qu'ils
accèdent tous à la foi en leur Messie
(v. 12), qu'ils soient ajoutés aux païens
et aux juifs qui, déjà maintenant,
croient en lui (v. 15).
Car, à ce
moment-là, ce qui reste encore caché
à l'Église sera
révélé : l'immense richesse qui,
pour le moment, lui est seulement promise, sera
déposée entre ses mains. Alors les
morts ressusciteront (v. 15).
Alors on verra et comprendra que,
dans la mort et la résurrection de
Jésus-Christ, ont déjà eu lieu la
fin et le commencement nouveau de toutes
choses... Mais tout cela n'aura pas lieu sans
Israël lui-même, sans leur "conversion
à tous"(v. 12), sans la
réintégration de ceux qui sont
maintenant rebelles (v. 15). L'Église attend
donc cet avenir. Et, en attendant, elle ne peut
pas se refuser à "servir" les juifs, en les
rendant "jaloux", en étant par toute sa vie un
acte de mission auprès des juifs. Comment,
dès lors, pourrait-elle être d'avis (v.
11) que Dieu a endurci la majorité des juifs
afin de les laisser tomber ? !..
L'endurcissement de la majorité
des juifs correspond ý une dispensation de
Dieu, et non à un scandaleux hasard. "Ainsi,
(de cette manière !), Israël tout entier
sera sauvé" (v. 26 a): son salut ne peut
être qu'un effet de la miséricorde divine
qui élève les humbles et abaisse les
hautains. Voici, dit le verset 26 citant
Jérémie 31, la dernière
disposition de Dieu à l'égard de son
peuple : "Le Libérateur
viendra de Sion et il détournera de Jacob les
impiétés". Le Sauveur s'occupera
alors de ceux qui sont perdus ..
Du fait que les pagano-chrétiens
sont des gens dont Dieu a eu pitié, l'action de
la miséricorde divine envers les juifs est
déjà déclanchée. La
deuxième partie de la phrase du verset 31 dit
en effet: " ......afin que,
par la miséricorde qui vous a
été faite, ils reçoivent
maintenant, eux aussi,
miséricorde". Cela veut dire qu'il n'est
pas permis aux chrétiens de renvoyer au
jugement dernier leur prise de position dans la
question juive. Au contraire, ils doivent, ici et
maintenant, tout faire pour que les juifs obtiennent
à leur tour miséricorde
"par la miséricorde qui
vous a été faite" (v. 31 b)!
Ce "mystère" (secret de Dieu pour
le déroulement de son plan historique de
salut), le Père François
Refoulé le comprend , lui aussi, comme Karl
Barth, à l'écoute de l'apôtre
Paul. Voici quelques unes de ses conclusions, à
la fin de sa minutieuse Étude
:" Et ainsi tout Israël
sera sauvé" (Romains 11. 25-32)
Édition du Cerf ñ pages 112 et suiv. et
254 et suiv.
" La grande espérance des
prophètes et des apocalypticiens était
qu'au dernier jour la souveraineté de Dieu
serait établie sur l'univers entier et
que le Dieu unique serait reconnu dans le monde
entier, et que ce monde serait conduit à la
perfection sous le règne direct du
Tout-Puissant ª Romains 11. 26-27 était
compris ainsi par les lecteurs juifs de Paul....
Ainsi l'expression "
vie d'entre les morts
" est synonyme de
"résurrection d'entre les
morts" et ne peut pas être prise
au sens figuré ou métaphorique.
Donc, pour Paul, le retour d'Israël
(à Dieu) sera le signal de la
résurrection, de la Parousie. Car
l'endurcissement d'Israël rend compte du retard
de la Parousie et laisse le temps pour une plus large
évangélisation des païens.
Ainsi, dans ces chapitres, la question
n'est pas : " quand les promesses messianiques
seront-elles définitivement accomplies " mais "
pourquoi ne le sont-elles pas encore ?". Sa
réponse est la suivante : "parce que Dieu
veut faire miséricorde aux
païens".
(Ou, pour préciser, parce que
Dieu n'estime pas encore "au complet" le nombre des
non-juifs auxquels Il a déjà fait
miséricorde en les "donnant" à son Fils
pour son royaume, et cela depuis le jour de la
crucifixion du Messie à Jérusalem)
Quant au Père Lagrange, le savant
dominicain fondateur de l'École Biblique de
Jérusalem, avec quelle lucidité
voyait-il le sens de ces textes !
"Saint Paul, épître aux
Romains " par le Père M-J Lagrange Gabalda 1931
; pages 277 & 278
Cette "vie d'entre les morts" ne doit
pas être entendue au sens spirituel mais au sens
réel indiquant la résurrection des
corps .. Comme la réprobation des juifs
a été l'occasion de la
réconciliation du monde, leur conversion sera
comme le signal de la consommation du monde et de
l'avènement d'un monde nouveau" .
Mais voici ce qu'ajoutait le Père
Lagrange en soulevant une question qui va nous occuper
un moment ("un rapport de temps") et en introduisant
malencontreusement la croyance traditionnelle à
un "jugement dernier" bien embarrassante en
l'occurrence :
"Mais, ajoute-t-il, il faut cependant
reconnaître que les expressions ne sont pas
très précises et qu'on ne saurait y
fonder des conjectures assurées sur un
rapport de temps entre la conversion des juifs
et la résurrection des morts, en d'autres
termes affirmer que le jugement dernier suivra
de prés la conversion des juifs".
NOUVELLES QUESTIONS
Nous voilà donc conviés
à regarder de plus prés (avec d'autres
textes que celui de Romains 9 - 11) cette grande
question que le Père Lagrange formulait ainsi :
quel est le rapport de temps entre la conversion des
juifs et la résurrection des morts ? Ou, en
d'autres termes : quelle est la relation temporelle
entre la réhabilitation des juifs "en masse" et
l'Avènement final du Messie ? Quel est l'ordre
de succession entre les deux termes ? Je veux dire
entre ces deux événements à venir
qui seront: d'une part la mise "au complet"de "tout
Israël" par " l'illumination" collective des
juifs jusque là aveuglés quant à
l'évangile et, d'autre part, le "retour" ou
"'l'arrivée" dans la gloire et la puissance de
Dieu du Christ crucifié, ressuscité et
élevé à la divine
souveraineté ?
Les deux "événements"
seront-ils simultanés ou successifs ? Et, dans
ce second cas, lequel des deux précédera
l'autre ou même le "déclenchera ª
?
Je pourrais formuler la question de la
façon suivante : le retour à Dieu de
"tout Israël" sera-t-il "le signal", le
prélude et la condition de
la manifestation finale de Jésus comme Sauveur
et Seigneur, ou bien sera-t-il la
conséquence et le premier
"effet" de cette Parousie du Messie
accompagnée de la parousie de son "corps"
(en-tête les ressuscités du milieu
des morts, selon I Thessaloniciens 4.
14-18) ?
La réponse à cette
question est plus importante qu'il n'y paraît.
Ce qui suit cherchera à donner une
réponse et à sortir de
l'indécision, en faisant abstraction de notre
croyance séculaire à un "Jugement
Dernier", vieille croyance héritée des
religiosités archaïques et
infiltrée comme un poison dans la foi au
Christ.
Redoutable poison qui change en "salut
par les oeuvres humaines" le "salut par la seule
grâce de Dieu" ! Et qui substitue
l'attente du Jugement à la prière
ardente pour que Jésus "revienne" vite.
Or, nos pères, les chrétiens de la
première génération, priaient
sans cesse en disant: "que ton
règne vienne .. et que ce monde
passe ! "
Un ardent enthousiasme les portait
au-devant de cet avenir promis qui vient vers
nous.
Alors nous, notre
génération (la dernière
peut-être !), va-t-elle se laisser saisir par
l'enthousiasme eschatologique que le Saint-Esprit veut
déverser dans nos coeurs ? Oui, qu'il en soit
ainsi !
Car c'est le Saint-Esprit et, par lui,
l'Église réveillée qui ensemble
prient pour l'avènement du Seigneur :
"L'Esprit
et l'Épouse
(l'Israël déjà
sauvé, la Jérusalem
d'en-haut )
disent:
"
viens !
Et celui qui garantit la
vérité de toute sa
prophétie déclare :
OUI, JE VIENS
BIENTÔT ! "
(Apocalypse 22. 17 et 20)
|
TRANSITION
Voici quelques réactions
provoquées chez moi, tout récemment, par la
prédication entendue dans une assemblée
chrétienne.
Le prédicateur lisait et expliquait
la "parabole des dix vierges" (Évangile de
Matthieu, ch. 25, 1 à 13).
Il donnait à comprendre qu'il
s'agissait là d'une parabole du "jugement
dernier", tout comme dans la suite du discours de
Jésus dans ce chapitre. "Tiens, me disait mon
esprit aux aguets, tiens ! ce prédicateur ne se
limite pas à la dernière partie de ce
chapitre (" le Roi séparant les brebis et les
chêvres") pour intituler cela "le jugement dernier"
comme le fait la T.O.B. ; en plus, c'est tout le chapitre
qu'il intitule ainsi!" et mon esprit critique retrouvait
là l'erreur, oui l'erreur qui, très
contagieuse, contamine les prédications
chrétiennes. Il faut donc regarder cela d'encore
plus prés, si possible. Et, en même temps,
être lucide sur la collusion qu'on constate entre
cette "hérésie eschatologique" et la
prédication d'un "salut par les oeuvres". Oui, en
prêchant ainsi le "jugement dernier", on conforte
les fidèles (protestants ou catholiques) dans la
fausse assurance qu'ils seront sauvés par les
oeuvres ! En effet, ces fidèles ne se voient pas "
à gauche" du Juge et ne sauraient envisager
sérieusement cette éventualité.
S'ils sont catholiques, ne sont-ils pas assurés
d'être " à droite" du fait même qu'ils
participent aux sacrements et se mettent au
bénéfice de la prière de la Vierge
et des oeuvres méritoires des Saints ? S'ils sont
protestants, ne sont-ils pas assurés d'être
" à droite" grâce à leur
participation à des oeuvres caritatives ou du fait
que leur "conversion" passée les a mis "en
règle avec Dieu" pour
l'éternité?
Et si ce sont des "clercs" qui proche..
Matthieu 25, ne sont-ils pas encore plus sûrs
d'être les "vierges sages" du simple fait que, du
haut de la chaire, ils exhortent le bon peuple à
ne pas être des "vierges folles "?
Du coup, laissez-moi ajouter en deux lignes
ce qui m'a également chagriné dans la
prédication de mon confrère serviteur de
l'évangile. Il a dit : "bien sûr, nous ne
savons ni le jour ni l'heure du Retour du Christ . Cela
peut se produire aujourd'hui même, ou dans vingt
ans .. ou dans deux mille ans ! Bigre ! 2000 ans de plus,
2000 ans de nouveau à attendre ! ! Là, j'ai
retrouvé la vieille chanson classique qui berce le
"sommeil eschatologique" des pagano-chrétiens
"traditionnels" en leur disant, en somme: " vous avez le
temps, prenez votre temps, le Maître a
déjà tellement tardé que ......
"EN
VÉRITÉ, dit le Seigneur, JE VIENS VITE !
J'ARRIVE SANS TARDER"
Suite 060-Psaume.html